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James Masy, sociologue : « Avec les prépas, on voudrait démocratiser l’élitisme, c’est presque un non-sens »

Sociologue et maître de conférences en sciences de l’éducation à l’université Rennes-II, James Masy a écrit une thèse en 2014 sur le rapport au temps des boursiers de classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE), toutes filières confondues. Il s’est également intéressé aux possibilités d’ouverture sociale de ces formations emblématiques de l’enseignement supérieur français. La diversification de l’offre grâce aux prépas « de proximité » – implantées à partir des années 1980 dans des villes de taille moyenne ou à proximité des grandes villes – a permis un élargissement du vivier, sans pour autant transformer en profondeur les mécanismes traditionnels d’un système élitiste, selon lui.
Les prépas de proximité ont le mérite d’avoir amélioré le maillage territorial des CPGE. Une nouvelle population scolaire est arrivée dans cette filière, plutôt de classes moyenne et moyenne supérieure. Ces élèves s’y inscrivent, puis intègrent les grandes écoles de milieu et de bas classement, pour devenir une élite régionale.
Mais c’est une ouverture sociale en trompe-l’œil, qui ne touche pas vraiment les populations qu’elle prétendait atteindre. Dans les années 2000, on disait que les prépas attireraient des jeunes de milieux populaires par le biais des CPGE technologiques et des femmes, et force est de constater que cela n’a pas bien fonctionné. Il n’y a pas eu une grande évolution dans le vivier prépa, si ce n’est un élargissement de celui-ci.
Il faut aussi rappeler que, depuis les années 1960, les effectifs d’étudiants dans l’enseignement supérieur ont beaucoup augmenté, au point que l’on parle d’une massification. Dans ce cadre, les prépas représentent moins de 3 % des étudiants en France, quand l’université en compte plus de 50 %. Avec les classes préparatoires de proximité, on s’intéresse donc à une petite partie des étudiants, qu’on souhaiterait plus représentative de la société.
On n’aura jamais de massification des prépas comme de l’enseignement supérieur dans son ensemble, parce qu’elles répondent à un besoin qui n’est pas seulement républicain et démocratique, mais économique. C’est-à-dire qu’on limite l’offre de formation pour créer une élite qui occupera des postes de direction importants dans notre société : les futurs manageurs de grandes entreprises, les cadres ingénieurs, et même des personnalités politiques.
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